Sortir : De quoi c'est parti, cette idée de réunir diverses affinités vocales ?
Jean-Cri :
Au départ,    Vincent (son frère) et moi avions monté un groupe avec instrus dans lequel on chantait tous les deux, et rapidement derrière, Fred nous a rejoint. En fait, lors d'un set, on s'est mis à chanter un tube des Beatles a capella... ça a tellement bien sonné, on s'est dit "allez, faisons ça !" De là est né le concept : faire tout à la voix avec des chansons à nous, en y ajoutant cette touche d'humour bien personnelle. Avec l'arrivée de Gilles à l'époque, le quartet était complet et on a travaillé là-dessus jusqu'au premier spectacle "les Z'animos". D'ailleurs, l'alchimie des voix s'est faite de suite.

Sortir : Pas un peu risqué justement de tout miser sur la voix ?
Bertrand :
Tout faire à la voix, les chansons, les bruitages, c'est un vrai choix. Au moment où on a commencé, c'était pas vraiment à la mode... À l'inverse des Etats-Unis, où il y en a partout, avec  l'influence du gospel notamment, en France, c'est plus difficile : on a les chorales, mais ajouter autre chose qui apporte une plus-value au chant, on a pas vraiment l'habitude. Pourtant, ce qui fait que le tout fonctionne, c'est l'ensemble "spectacle vivant". C'est ce que je me suis dit en les voyant la première fois (avant de les rejoindre) : "ils arrivent à faire un spectacle super intelligent, drôle, et en plus ça chante bien", du coup ils parviennent à faire oublier le côté technique. Quand tu resors du spectacle, t'as l'impression d'avoir vu plein de choses, d'avoir cotoyé 50 univers, alors que finalement y'a uniquement quatre mecs et leur voix sur scène.

Sortir : Y'a aussi un gros travail d'écriture derrière...
Bertrand :
Tout part du texte de toute façon : la majorité des textes, c'est Jean-Cri, c'est lui qui a insufflé l'esprit Frères qui évolue d'années en années.
Jean-Cri : La vie, ses expériences font aussi évoluer le ton... on a des trucs potaches, très bébêtes, et on a également des choses noires, plus fines. Mais peu à peu, les textes sont de plus en plus partagés, on écrit tous ensemble : on parle de tout, la bouffe, la mort, l'amour...

Sortir : On trouve également pas mal de reprises dans le dernier spectacle.
Vincent :
C'est vrai, y'a du Gainsbourg, du Brel, du Brassens... y'a même une reprise d'une chanson à nous du premier spectacle ! Sinon, Hervé Villard aussi, on aime beaucoup, à un autre degré !... En fait, ce sont des chansons déterrées : les paroles ne changent pas, mais physiquement, dans l'interprétation, elles prennent un autre sens, c'est ce qui les rend drôles. Le principe consiste dès l'entame à amener le public dans un monde, en fonction de la chanson qui va suivre.

Sortir : Ce qui n'est pas forcément facile à faire ressortir en CD...
Bertrand :
C'est pour ça que le dernier CD est différent des précédents : contrairement à ceux enregistrés en live, là, y'a un vrai boulot de studio, autour de Fred (Foulquier), le mixeur. L'idée, c'est d'utiliser tous les outils techniques pour palier au manque d'image. La partie visuelle que les gens n'ont pas en écoutant le disque, on essaye de la compenser par cette richesse niveau effets, instrus-voix : notre réflexion sur ce CD part de là.

Sortir : Des effets techniques que l'on retrouve également sur scène.
Fred :
Sur scène, c'est beaucoup de travail de son, de jeux de lumière, de précision, c'est un boulot énorme ! Ça renvoie l'illusion que c'est le bordel, mais c'est réglé au millimètre... on a une vraie liberté dans le spectacle et l'interprétation, mais en même temps le tout est super ficelé. Au final, avec l'ingé son, les créations lumière, c'est un travail d'équipe où chacun a son importance.

Sortir : Et donc là, vous partez pour pas mal de dates, notamment dans la région...
Jean-Cri :
On va tourner pas mal dans le coin (Canéjan, Libourne...), mais aussi à Toulouse, Bayonne, Pau, Paris... y'aura aussi le Festival d'Avignon l'été prochain. Mais c'est vrai que ça l'a toujours fait dans la région : en Gironde, pas sûr que certains tournent autant que les Frères. D'ailleurs il y a quelques temps, on avait rempli deux soirs de suite la Médoquine : à l'époque, on nous avait dit que les seuls à avoir fait pareil, c'était Noir Désir. Idem pour les artistes de la région programmés au Pin Galant : ils sont plutôt rares. D'ailleurs, le spectacle là-bas (le 16 mars prochain) sera un peu particulier avec pas mal d'invités croisés depuis nos débuts.

Sortir : Après tout ça, ce sera quoi la suite ?
Bertrand :
C'est simple, un prochain spectacle qui va bientôt entrer en création, et puis l'an prochain, qui sera une année importante, l'année des 15 ans. D'ailleurs, on a battu le record des Beatles, ça me plaît plutôt bien : si y'a un record où on les aura battu au moins, ce sera celui-là.