Entrez dans la danse !

Les écrans ondulent, glissent, coulissent, tournoient,swinguent et balancent dans la grande nef du Fresnoy pour un hommage au jazz des années folles, quand les corps des danseurs noirs américains se désarticulaient au son du boogie-woogie et du be-bop dans une liberté de mouvement alors inconnue, parfois plus proche de l’acrobatie que de la danse. Au Cotton Club, Harlem, Broadway ou à Hollywood, le jazz inventait le corps moderne que les danseurs de hip-hop d’aujourd’hui n’ont pas oublié. Même le plafond se transforme en écran pour les films de jazz de la collection Jo Milgram conservés à la Cinémathèque de la Danse qui possède un fonds unique au monde. La musique s’incarne dans le rythme virtuose et permanent des claquettes qui envahit l’espace d’exposition et qui n’est pas étranger à cette irrésistible envie qui nous prend, sinon de danser (pourquoi pas ?), du moins de bouger.

Conçue par Alain Fleischer sur une proposition de Pascale Pronnier qui a collaboré à sa réalisation, cette exposition doit beaucoup au scénographe du Fresnoy, Jacky Lautem qui a su se plier techniquement aux exigences artistiques du mouvement intégral des écrans voulu par les commissaires car pas question de présenter les films de Jo Milgram dans une salle de cinéma. Il fallait les exposer et les scénariser. Donner à sentir physiquement aussi bien qu’à voir cette dissidence des corps emportés par l’extrême virtuosité des mouvements que le jazz leur dicte. Le visiteur, immergé dans les images au cœur d’un environnement tourbillonnant en noir et blanc, ne sait plus où donner de la tête devant ces multiples projections simultanées et virevoltantes et sort heureux de son expérience. Quel beau clin d’œil à l’histoire du lieu et à sa piste de danse originelle…