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Audrey Ardiet : nouvel élan à la Rose des Vents

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Nommée à la direction de la scène villeneuvoise en janvier dernier, Audrey Ardiet, entre exil forcé du fait de la réhabilitation de la salle historique et nouveaux horizons artistiques évoque sa première saison multiple et ouverte.

Sortir : Comment démarre la saison de la Rose des Vents ?

Audrey Ardiet : Pour l'instant, c'est plutôt encourageant. Depuis la saison dernière on revient à des jauges similaires à la période d'avant COVID, ce qui est plutôt rassurant. Le public reste attaché au projet, il suit aussi le périple de la Rose des Vents du fait des travaux.

 

Sortir : Le nomadisme imposé par les travaux en cours sur le théâtre rend-il plus compliqué le maintien de ce lien avec le public ?

A. Ardiet : En fin de saison dernière, les spectateurs nous disaient découvrir de nouveaux lieux avec plaisir. Nous essayons aussi de leur faciliter ce moment en mettant régulièrement des navettes à disposition pour rejoindre le lieu des représentations. Même dans des espaces comme la Condition Publique, les spectateurs réguliers ont désormais trouvé leurs repères. Ce qui n'empêche pas qu'ils nous disent aussi leur envie de retrouver le théâtre. Nous avons fait des visites pour découvrir le chantier au cours des Journées du patrimoine et il y avait un vrai enthousiasme chez les participants, pressés de retrouver ce lieu emblématique de la ville de Villeneuve d'Ascq.

Une partie des spectateurs continue de venir à la programmation de saison pour repérer les spectacles qui les intéressent. Beaucoup passent aussi par le site internet qui reste une vitrine importante. Il est certain que l'équipe des relations publiques est toujours sur le terrain. L'intérêt du public n'est jamais un acquis, mais l'une des forces de la Rose des Vents c'est la convivialité et la disponibilité de nos équipes. Au retour dans les murs, l'espace du café permettra de prolonger cette convivialité, ça reste indispensable pour nous.

 

Sortir : Cette obligation de programmer hors les murs se combine aussi avec une mutualisation renforcée avec d'autres partenaires culturels de la Rose des Vents. Cela indique-t-il un renforcement à venir de cette mise en commun des moyens ou n'est-ce qu'une nécessité imposée par les circonstances ?

A. Ardiet : Nous avions déjà des propositions communes avec d'autres lieux (le Théâtre du Nord, le Grand Bleu, l'Opéra parfois ou Le Prato...) au fil de différentes programmations. C'est une habitude dans la région et dans la métropole de Lille que de faire des choses en commun, dans une démarche collective et sans concurrence. Chacun a sa place mais lorsque se dessinent des convergences possibles, nous le faisions aisément et presque naturellement. C'est une pratique ancrée dans le fonctionnement de la Rose des Vents. Avec le chantier en cours, c'est un axe que nous avons naturellement renforcé. Sur une proposition cirque par exemple, j'ai tout intérêt à m'associer avec le Prato qui a une expertise en la matière. Sur une grande forme de théâtre comme le Némésis de Tiphaine Raffier, on est content de le faire avec le Théâtre du Nord, parce que c'est un énorme spectacle. C'est pareil pour le Grand Bleu avec le jeune public. Chaque lieu possède son identité et on peut réfléchir ensemble à mieux mettre en valeur les savoir-faire de chacun.

 

Sortir : Cela incite aussi le public à découvrir d'autres salles, parfois plus petites, de la métropole. C'est aussi une démarche qui a vocation à se poursuivre ?

A. Ardiet : Sur des lieux comme l'Étoile à Mouvaux ou la salle Allende à Mons-en-Baroeul (NDLR : fermée en ce moment du fait de dégradation au cours des émeutes), les lieux nous sont mis à disposition mais économiquement y tout est à notre charge. Après les travaux, il nous faudra faire fonctionner notre théâtre et en assumer les charges. Dans les autres lieux avec nos partenaires comme le Théâtre du Nord ou le Grand Bleu par exemple, nous nous partageons les frais de production et d'accueil, ce qui est différent. Nous n'avons pas vocation à aller continuellement dans des lieux comme l'Étoile, économiquement ce ne sera plus faisable une fois le chantier de la Rose des Vents achevé.

 

Sortir : Cette saison ouvre aussi une fenêtre sur l'univers de la magie nouvelle. C'est un sillon que les saisons futures continueront de creuser ?

A. Ardiet : Il y a une intention sur la durée. La pluridisciplinarité et l'ouverture à de nouvelles disciplines, notamment la magie et le théâtre d'objets, est l'un des axes qui m'est cher. J'ai associé Thierry Collet au projet de cette saison. Il viendra présenter son spectacle en janvier et, au-delà, comme conseiller artistique, il m'a assisté dans l'édification d'un nouveau rendez-vous qui aura lieu tous les ans fin mars-début avril, avec une volonté de le faire grandir et évoluer. La magie est à la fois un art populaire qui permet de toucher différemment le public, mais aussi une discipline qui questionne la manipulation et ce qu'elle implique. C'est tout ça qui m'intéressait.

 

Sortir : En juillet a eu lieu le premier rendez-vous de Fêtons l'été !, cela participe-t-il d'une volonté de retisser un lien local plus marqué ?

A. Ardiet : Au moment du COVID en 2020, nous avions organisé rapidement un été culturel qui avait été enthousiasmant. Fêtons l'été ! constitue un rapprochement avec les structures complices de Villeneuve d'Ascq afin de nous regrouper pour proposer un rendez-vous partagé au début de l'été avec la ville et les habitants. C'est une démarche que nous maintiendrons, parce qu'elle permet aussi de maintenir des propositions à des moments et des endroits qui font sens pour nous et ce que représente la Rose des Vents.

 

Sortir : Ce que les saisons hors les murs dessinent préfigure-t-il déjà ce que sera la démarche du lieu une fois les travaux achevés ?

A. Ardiet : La ligne artistique et notre démarche ne seront pas bouleversées. Ce que je pressens en revanche c'est qu'il y a des endroits où une attente demeure forte, notamment la danse. Les propositions que nous faisons sont très suivies. Au retour sur le plateau de la grande salle, je pourrai sans doute être davantage présente sur cette discipline. De même, le gradin de la salle rénovée (450 places assises) sera complètement repliable, permettant d'accueillir un millier de spectateurs debout. Une jauge intéressante dans la métropole pour accueillir par exemple des concerts de musique actuelle, avec le Grand Mix par exemple. De même sur la magie, les espaces du nouveau lieu seront propices à une myriade de propositions.

 

Sortir : Dans quelques semaines, on fêtera les 20 ans du début de l'année de Capitale Culturelle Européenne de Lille. Le dialogue avec les responsables politiques, dont dépend le financement de la cultuire, est-il devenu plus difficile depuis ?

A. Ardiet : Je n'ai pas eu ce sentiment en arrivant. J'ai senti un apaisement, une envie de faire les choses ensemble. Au niveau de la ville de Villeneuve d'Ascq, ils ont vu que nous avons travailler à essaimer et à être présents sur le territoire tout en programmant dans différents lieux partout dans la ville et en mettant en place des moments comme Fêtons l'été ! justement. Le dialogue est renoué et au contraire, j'ai souvenir d'un échange avec le maire au moment de ma nomination qui disait à plusieurs reprises être content d'avoir une scène nationale sur son territoire. Il m'a dit aussi qu'il « fallait montrer du beau à la population » avec une attention particulière aux habitants qui ne viennent pas forcément à la Rose des Vents, ce qui sera un enjeu fort de la réouverture. Je me suis sentie plutôt soutenue et bien entourée.

 

Sortir : La programmation se fait en itinérance jusqu'en 2025, date annoncée de la fin des travaux. La perspective du retour dans un bâtiment implique des charges financières différentes. Avez-vous la garantie de disposer de suffisamment de moyens pour faire vivre un tel lieu sans devoir transiger ?

A. Ardiet : C'est en effet un point d'inquiétude. Nous sommes pour l'instant hors les murs et le travail se fait avec une équipe technique réduite, puisque nous passons par des intermittents. Ce ne sera plus le cas au moment du retour dans la salle, il nous faudra revenir à une équipe permanente, ce qui implique une masse salariale et des frais de fonctionnement forcément différents. Cela fait partie des discussions en cours avec nos tutelles. Comme beaucoup de collègues, je ne sais pas encore si nous disposerons complètement de moyens suffisants qui n'impliqueront pas de sacrifier une part de notre activité par exemple.

Sortir : Le Méliès demeure aujourd'hui un des derniers cinémas indépendants et largement ouvert aux cinématographies du monde. Sa présence au sein de la Rose des Vents est-elle importante ou n'est-ce qu'un héritage du passé ?

A. Ardiet : C'est essentiel. J'essaie de le rappeler autant que possible, de dire que la Rose des Vents et le Méliès demeurent intimement liés. Il nous faut continuer à accentuer cette sensibilisation. Nous travaillons notamment sur l'axe documentaire que nous souhaitons développer, en attachant par exemple cette année des propositions à des rendez-vous de la programmation via les rendez-vous de l'oeil du Méliès. C'est une chance que d'avoir ce cinéma, mais avec un seul écran nous ne pouvons malheureusement pas projeter toute la diversité des sorties.

Publié le 24/10/2023 Auteur : Propos recueillis par Guillaume B.

 

Propos recueillis par Guillaume B.

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Mots clés : Saison 23-24 interview