Mère

À partir d’éléments autobiographiques, Wajdi Mouawad déploie une fiction dans laquelle le regard d’un enfant de dix ans observe le croisement entre l’histoire d’une famille en exil et la grande Histoire. Une pièce bouleversante sur son enfance exilée.

Depuis qu’il écrit, Wajdi Mouawad, actuel directeur du Théâtre national de la Colline à Paris, bâtit une œuvre contre la perte. Dans Mère, il renoue avec l’enfant qu’il fut et tente désespérément de retrouver cette mère bousculée par la vie, morte prématurément. Fuyant la guerre civile libanaise, elle et ses trois enfants trouvent refuge à Paris, tandis que le père est resté gérer ses affaires au pays. Cinq années d’attente et d’inquiétude, pendant lesquelles tous espèrent la fin de la guerre pour retrouver leur vie d’avant et leur terre natale.
Formidablement interprétée par l’actrice libanaise Aïda Sabra, on découvre une mère perpétuellement sous tension. Sa superbe langue, éloquente et imagée, traduit l’angoisse insoutenable d’une femme seule, dont la famille est éparpillée dans le monde.
Quant à Christine Ockrent, jouant avec talent son propre rôle, elle incarne aussi la place centrale de la télévision dans les foyers d’alors, mais aussi les évènements marquants de la sanglante guerre du Liban, qui à l’époque, en France, peinaient à voler la vedette au déficit de la Sécurité sociale…
Bien des années plus tard, l’homme qu’est devenu Wajdi Mouawad dresse de cette mère un portrait d’une tendresse douloureuse, où demeurent béantes les plaies ouvertes par le deuil et l’exil. Il sait pourtant que sans eux, il ne serait pas l’homme qu’il est aujourd’hui. Debout et vibrant sur la scène.